Une porte massive auréolée d'une lumière violacée lui barre le passage. Des sons étouffés semblent provenir de l'intérieur, Prozelia se demande si ce sont des rires ou des gémissements. Elle va pour la pousser mais la voila qui s'ouvre d'elle même dans un grincement métallique. La démoniste se laisse happer à l'intérieur, attirée par une étrange odeur de pâtisserie qu'elle n'avait jamais encore jamais sentie, ou peut être que si mais elle ne saurait dire quand. D'ailleurs, a t-elle déjà senti? Dedans, elle se retrouve dans un magnifique jardin superbement entretenu, parsemé de fleurs multicolores sur lesquelles de majestueux phalènes effectuent un roulement gracieux.
La démoniste sourit à cette vision mais une mélodie scandaleuse sur sa gauche vient rompre sa béatitude. Une dizaine de nains dansent une polka endiablée, le visage dégoulinant de sang, et la pointent du doigt tous les quatre temps, en criant "Hey!". Surprise, elle recule, se prend les pieds dans des ronces qui viennent de sortir du sol et bascule dans une trappe qui apparait et s'ouvre dans un timing surnaturel.
Elle est entrainée dans une chute interminable dans un noir complet. combien de temps dure-t-elle? 20 secondes? 30 minutes? après finalement 5 secondes de chute elle atterrit le cul sur la pierre, dans une vaste salle aux murs constellés de fenêtres de formes et de tailles différentes. A l'autre bout, une porte en bois est grande ouverte, et elle distingue à l'extérieur un soleil éclatant. Prozelia traverse la pièce pour s'y rendre. A mi-chemin, une fenêtre s'ouvre avec fracas. une banshee lui hurle dessus d'une manière odieuse et la referme en la claquant. La démoniste court vers la porte, la passe, et se retrouve sur une plaine d'herbes hautes, de nuit, sous une pluie battante. Elle regarde autour d'elle et distingue au loin une chaumière. Les lumières sont allumées et une fumée blanche et opaque s'échappe par le cheminée.
Prozelia lutte dans les hautes herbes pour arriver finalement devant la maisonnette. Il ne pleut plus, et le silence règne, seulement troublé par l'agréable bruit des grillons. La démoniste s'approche d'une fenêtre pour regarder discrètement à l'intérieur à travers les carreaux. Une femme se tient de dos, penchée sur un couffin, et semble chantonner. Sa silhouette lui est familière. La femme se retourne brusquement vers elle, ce qui fait sursauter Prozelia, et lui fait signe d'entrer.
La réprouvée entre dans la maison et se dirige vers la pièce au couffin. Il n'y a personne dedans. Prozelia s'approche du couffin et se penche au dessus. Un tres bel enfant s'y trouve et lui fait un grand sourire. Le bébé tend une adorable petite main vers elle. La démoniste se met à chantonner à voix basse une berceuse qu'elle ne connait pas et elle tend elle aussi sa main vers l'enfant. Ce faisant, elle se rend compte que la peau de sa main est superbe et ses ongles parfaitement taillés et vernis. Après vérification elle comprend à sa grande surprise qu'elle est humaine.
Prozelia prend l'enfant dans ses bras et commence à le bercer. Elle est heureuse. Elle ferme les yeux et reste ainsi quelques minutes à savourer ce moment d'humanité, jusqu'à ce qu'une sensation bizarre de liquide poisseux sur ses mains l'oblige à les rouvrir.
Elle se rend compte avec horreur que ses mains griffues l'ont mis en pièces, et se met à le dévorer frénétiquement. Des coups sont frappés à la porte, qui est aussitôt enfoncée. 3 créatures malsaines font irruption dans la pièce qui s'est subitement agrandie. Mi hommes, mi chevaux, ils sont armés, portent le blason d'Hurlevent et se mettent aussitôt à charger. C'est un véritable massacre. En transe, Prozelia leur fait subir toute sa panoplie de malédictions. L'un brûle à petits feux en hurlant pendant que celui à sa droite, corrompu par l'ombre, se désagrege et termine en un petit tas bouillonnant. Le dernier tente une attaque frontale mais une malédiction d'épuisement lui fait lâcher sa hallebarde et ralentir sa course. La réprouvée lui arrache la gorge de ses dents acérées.
Prozelia se met à courir en poussant des cris hysteriques. La voila donc sur une route de campagne, au clair de lune. Petit à petit elle ralentit sa course pour finalement, au bout d'une dizaine de minutes, s'arreter et reprendre son souffle. Depuis quand j'ai un souffle, se dit elle. Elle se penche au dessus d'un étang au bord du chemin et observe son reflet dans l'eau calme. Elle est couverte de sang et le liquide pourpre dégouline de son visage et tombe dans l'eau en faisant ploc.
Elle passe de l'eau sur sa figure et regarde à nouveau. Elle y voit une jolie adolescente au teint parfait, une belle chevelure brune tombe en cascade depuis ses épaules jusqu'a un décolleté défiant la gravité. Des larmes coulent de ces yeux magnifiques qui lui semblent à la fois étrangers et familiers. Le liquide salé dégouline de son visage et tombe dans l'eau en faisant ploc.
La tête basse elle reprend sa route, se demandant ou elle va la mener. Elle finit par arriver à un village. Tous ses habitants sont dans les rues, souriants, et s'inclinent sur son passage. Certains l'applaudissent. Sur la place centrale se trouve un autel de pierre baigné de soleil. Divers fruits aux couleurs éclatantes sont disposés cà et la dans des paniers, tels des offrandes. Prozelia touche la pierre chaude.
Le tonnerre éclate et l'obscurité s'abat sur les lieux. Elle est à présent derrière l'autel, et face à elle une bonne centaine de squelettes grotesques sont prosternés. Un murmure glauque s'échappe de cette foule nauséabonde comme le chant d'un aliéné. Prozelia crie et supplie de la laisser tranquille. La centaine de mâchoires se mettent à grincer des dents en même temps et la démoniste se bouche les oreilles, ce qui ne change rien à ce bruit obscène. Elle prend sa tête entre ses mains décharnées et hurle à qui viendra la sauver. Pour la première fois de son existence elle demande du secours, vite, que quelqu'un la tire de la.
Oooooooooooooooooh...
Une lumière éclatante semble descendre du ciel. Une forme familière se trouve en son centre mais elle ne peut la distinguer. Elle brille de mille feux et pendant quelques instants Prozelia pense que c'est la Lumière avec un grand "L". Elle pense aussi que c'est la fin de son agonie existentielle.
Les squelettes se désintègrent au fur et à mesure que la forme descend en soupirant.
Ooooooooooh...
une explosion de lumière.
Oooooh...
Une gifle monumentale mais indolore.
Oh!
Eh !
Prozi!
Oh Prozi t'es avec moi la?
Lazyal se tenait à califourchon sur sa maitresse, les yeux emplis de panique. Prozelia regarda son diablotin, le chassa du revers de la main, et prit quelques secondes pour reprendre ses esprits.
-T'étais partie loin la t'es flippante des fois !
-Qu'est ce que tu racontes encore?
-C'est la première fois que tu fais un truc pareil ! tu t'es retirée pour te reposer et méditer, comme d'hab', donc moi tu m'connais chui allé jouer avec mes ptits bonzhommes en attendant.
Elle jeta un regard aux figurines à moitié fondues qui jonchaient le sol de sa cabane.
-euh oui et donc?
-Ben tu t'es mise à hurler comme une elfette à Elwynn, yavait pas moyen de te ramener, t'as failli me zigouiller 3 fois au moins ! dit il en lui montrant 5 doigts.
-Ah? Je sais pas ce qui s'est passé.
-C'est nouveau ca? je t'avais jamais vu avoir peur de quelque chose avant. Nie pas, t'avais les j'tons ! c'est qui qui t'as fait peur que j'aille lui botter le cul?
La démoniste, a présent revenue à la réalité, regarda son serviteur droit dans les yeux.
-Lazyal, la seule personne qui me fait peur dans ce monde, c'est moi.
-J'peux te botter le cul alors?
Et les deux compères partirent dans un fou-rire libérateur.
(à suivre)